Yto Barrada ouvre son exposition monographique au museé M à Louvain

Quelle est la relation entre notre identité et notre culture, notre passé et nos traditions ? Par ses photos, films et installations, Yto Barrada (°1971,Paris/Tanger) aborde des thèmes actuels et universels en s’appuyant sur l’histoire du Maroc. Ses oeuvres poétiques créent des liens entre le jeu, l’histoire, la politique, le tourisme, l’ethnographie et notre société de consommation. Au musée M, elle présente quelques-unes de ses oeuvres récentes ainsi que son dernier film 'Faux Départ' et la nouvelle installation 'Salon Géologique'. L'exposition est un double projet avec le parcours d'art Tracing the Future dans le cadre du festival urbain 500 ans d’Utopia à Louvain.

Fossiles

La recherche multidisciplinaire de Barrada vers l’histoire préhistorique et campagnarde de l’Afrique du Nord la mène à un grand set de questions. Une piste la mène à Dinosaur Road, la région entre l’Atlas et le Sahara, où des objets sont déterrés, préparés, commercialisés et parfois falsifiés. Le film Faux départ (2015) montre l’ample commerce en fossiles au soi-disant Dinosaur Road (Rue des Dinosaures). Le film est en premier lieu un hommage aux « préparateurs ». Ces artisans répondent et contribuent à ce commerce florissant dans des formes vraies, fausses et hybrides des artefacts. En même temps, le film est un rappel à l’ordre à l’adresse du monde riche avec son attirance fétichiste pour des objets exotiques. Il dévoile, de manière sournoise, notre désir pour l’authenticité. Faux départ a gagné le pris pour meilleur court métrage au Festival International du Film de Rotterdam en 2016.  Une autre recherche examine le rôle des ethnographes et muséologues qui travaillent dans la région et la manière de présenter leurs objets de recherche. Au M elle montre la série Lying Stone Hearts (2015) avec douze fossiles en forme de coeur et une moule correspondante, un inventaire de dinosaures « marocains » et Beringer’s Lying Stones Series (2014-2015). Cette série montre une collection de photos de fossiles que le monde a connues au début du dix-huitième siècle grâce au professeur Johann Bartholomeus Adam Beringer. 

Salon géologique

La curiosité profonde de Barrada est axée sur la relation entre le Maroc et son passé paléontologique. En particulier, elle se concentre sur l’absence remarquable de chaque forme de contexte dans les écoles, les musées, et la conscience nationale concernant ce patrimoine unique.  Au M elle montre une série d’empreintes de panneaux éducatifs qui expliquent les différentes couches terrestres et les fractures géologiques. Elle a trouvé les panneaux dans le Natural History Museum à Azilal, Maroc. Les mêmes couches claires sont présentes dans la nouvelle installation Salon géologique, qui a été dessinée ensemble avec l’atelier de Stéphanie Marin (Smarin). Des tapis et des coussins entassés – avec des empreintes de codes géologiques- évoquent le dessin modulaire d’un salon marocain. Salon géologique est interprété comme une réflexion sur le Salon Lyautey, la salle de réception du général français Hubert Lyautey (1854-1934) de l’époque où il était donneur d’ordre d’une exposition coloniale en 1931. Lyautey était le résident-général du Maroc de 1912 jusqu’à 1925. En même temps l'installation contient un clin d’oeil à La Boîte-en-valise de Marcel Duchamp, un modèle portable qui existe de 68 répliques miniatures d’oeuvres faites auparavant par l’artiste. 

Lyautey

En tant que résidant-général du Maroc, Hubert Lyautey voulait faire renaître l’empire marocain sous le protectorat français. Il allait réinventer le Maroc. Pour cela, il accentuait des termes comme ‘tradition’ et ‘authenticité’ et il développait un programme qui comprenait aussi bien l’agriculture, l’urbanisme que la renaissance de l’artisanat du tapis. Dans le contexte plus large du travail de Barrada, son intérêt constant pour l’héritage de Lyautey en dit long. Barrada refuse de céder au concept simpliste du colonialisme comme si ce n’est rien de plus qu’une soumission et une exploitation. Les blocs de Lyautey Unit Blocks (2010) épèlent non seulement le nom de cette figure controversée. A part une référence colorée au goût de Barrada pour les jouets, ces « blocs de construction » renvoient aussi aux blocs d’appartements et d’hôtels qui apparaissent sans cesse au Maroc. Chaque partie de terrain en friche est appropriée par le capitalisme de l’immobilier et la politique néolibérale n’empêche rien aux développeurs. Lyautey avait aussi de grands projets de construction pour le Maroc et a encouragé ainsi le tourisme débutant.

Jeu et jouets

L’oeuvre de Yto Barrada est caractérisée par un intérêt pour la pédagogie, le jeu, les jouets et les modèles éducatifs, et pour l’humour comme forme de rébellion.  Le palmier – l’icône de l’exotisme- joue aussi un rôle important dans un certain nombre d’oeuvres de Barrada. Cet arbre est, entre autres, un motif important dans la vidéo Beau Geste (2009). Le film donne une sorte de mode d’emploi (probablement inutile) pour le ‘jardinage guerilla’. Le film montre une équipe, embauchée par l’artiste, qui entreprend des tentatives maladroites pour soigner et renforcer le palmier qui a été abîmé expressément par le propriétaire du terrain en friche. L’installation Plumber Assemblage (2015) dévoile également l’amour de Barrada pour la collection d’objets quotidiens. Ce sont des bricolages précieux fabriqués de pipelines et robinets de douches qui peuvent être trouvés dans le souk de Tanger. Ils sont fabriqués par des plombiers sans travail aussi bien pour montrer leurs capacités que pour montrer qu’ils sont libres pour accepter du travail.  Le North African Toys Series (2014-2015) est une série de photos de jouets faits à la main par des Berbères de la collection du Musée du Quai Branly à Paris. Plusieurs de ces pièces ont été collectionnées par des expéditions ethnographiques françaises dans les années 1930.

Bio

Yto Barrada est née en France en 1971 et a grandi à Tanger et à Paris, où elle a étudié l’histoire et les sciences politiques à la Sorbonne. Elle a poursuivi ses études à l’International Center of Photography à New York. Yto Barrada a présenté des expositions dans le monde entier aussi bien dans des musées que lors des festivals d’art ; ses oeuvres d’art ont fait partie de biennales et ont été intégrées dans des collections publiques. Les dernières années, elle a remporté différents prix importants. Cette année, elle est nominée pour le ‘Prix Marcel Duchamp’, un prix attribué chaque année à un artiste français important.

Son oeuvre a été montré entre autres à The Power Plant, Toronto (2016) Carré d’Art, Nîmes (2015), Centre Pompidou, Paris (2014), Museum of Modern Art, New York (2013), San Francisco Museum of Modern Art, San Francisco (2012), Tate Modern, Londres (2011), Haus der Kunst, Munich (2010). En 2007 et 2011 elle a participé à la Biennale de Venise. Elle est également co-fondatrice du Cinémathèque de Tanger.

Yto Barrada est représentée par Pace Gallery, Londres, Galerie Sfeir-Semler, Hamburg/Beirut et Galerie Polaris, Paris.

Infos pratiques

Yto Barrada: 30.09.16 >< 17.01.17 au M-Museum Leuven.

Commissaires d'exposition: Stéphane Symons, Hilde Van Gelder & Eva Wittocx

Exposition du Musée M de Louvain en collaboration avec l’université KU Leuven dans le cadre d’Utopia, un projet à l’échelle de la ville.

Yto Barrada est un double projet avec Tracing the Future dans le cadre du festival urbain 500 ans d’Utopia.

Collaboration entre Yto Barrada & Stéphanie Marin pour le Salon géologique (pdf)

PDF - 1.3 Mb

Dossier de presse (pdf)

PDF - 539 Kb

Veerle Ausloos

M Leuven

Recevez des mises à jour par e-mail

En cliquant sur « S'abonner », je confirme avoir lu et accepté la Politique de confidentialité.

À propos de M Leuven

Contact

L. Vanderkelenstraat 18 3000 Leuven Belgium

+ 32 16 27 29 29

[email protected]

www.mleuven.be